Juliette Ricou – Desu coaching Paris8, auteure de : « Apports et limites de l’outil MBTI en coaching individuel » répond aux questions de RCI.
RCI : Quels sont les apports et les limites d’un inventaire de personnalité en coaching ?
Si l’on en croît les prescripteurs de coaching et les coachs eux-mêmes, un coach doit maîtriser au moins un outil de connaissance de la personnalité (Golden, MBITI, Process Com, Enéagramme…). Ces outils sont en général construits selon un modèle psychodynamique avec pour présupposé qu’il n’existe pas de type de personnalité meilleur qu’un autre. Ils sont largement utilisés en entreprise dans le cadre de formations au développement personnel, à la communication et au management. Pour ce qui est du coaching, je suis d’accord pour dire que la connaissance d’une théorie de la personnalité constitue un basic pour le coach. En revanche, il me paraît nécessaire de rappeler que son utilisation peut avoir des effets pervers.
RCI : la connaissance d’une théorie de la personnalité est-il un levier majeur pour la réussite d’un coaching ?
La connaissance d’une théorie de la personnalité permet au coach d’améliorer ses qualités relationnelles et stratégiques. Le coach utilise la théorie pour mieux se connaître. Il prend ainsi garde à ses propres projections, accède à la conscience que son mode de fonctionnement est une construction subjective du monde et met cette subjectivité entre parenthèses en coaching. L’inventaire de personnalité permet également au coach de repérer les modes de fonctionnement préférentiels de son client, de les accepter pleinement, sans jugement de valeur : c’est un facilitateur d’alliance. Enfin, le coach peut s’appuyer sur l’inventaire de personnalité de son client pour l’aider à repérer plus vite ses forces et son potentiel de développement en support à l’atteinte de ses objectifs.
Les apports de l’outil de personnalité pour le coach se transposent aisément au coaché : la connaissance de soi permet la gestion de soi, la compréhension des différences de personnalités assouplit sa vision du monde et lui donne les clés d’une gestion efficace de ses relations. La transmission d’un modèle de personnalité peut aussi favoriser l’autonomie de la personne accompagnée car il fournit des patterns opérationnels pour la gestion de soi au quotidien et tout au long de la vie (ex. gestion du stress, identification des critères de valeurs, préparation aux transitions de vie…). C’est aussi l’occasion de renforcer l’estime de soi par un retour d’image du profil de personnalité qui met en valeur des comportements et des façons d’être que le coaché peut avoir considérés à tort comme négatifs au regard de la norme sociale. L’inventaire de personnalité peut ainsi avoir une fonction utile de recadrage.
RCI : A contrario, s’appuyer sur le seul inventaire de personnalité ne revient-il pas à déposséder le client de son propre coaching ?
L’inventaire de personnalité opère une simplification réductrice de la personnalité et peut induire chez le coach des biais de disponibilité de l’information : à s’enfermer dans cette seule grille de lecture, le coach s’éloigne des ressources fondamentales du coaching (empathie, questionnement maïeutique, intuition,…) et substitue ces ressources en cherchant à faire entrer le coaché dans son modèle. Il risque alors de faire des erreurs quant à la stratégie à adopter avec son client.
Par ailleurs, se limiter à une approche intrapsychique du coaching n’est pas une condition suffisante pour la réussite du dispositif. Cette approche tend à induire une psychologisation excessive des comportements et à occulter les facteurs situationnels et contextuels du coaché et de sa demande. Le risque encouru est alors de diminuer la capacité critique du client :
- D’une part, en brimant sa motivation à agir sur son environnement ;
- D’autre part, en l’incitant, par le jeu de la prophétie auto-réalisatrice, à sur-jouer son profil de personnalité ou encore à considérer certains de ses comportements comme non modifiables.
Il faut aussi rappeler que ce type d’outil s’appuie en général sur la réponse à un questionnaire psychométrique. L’utilisation d’un questionnaire, en tout début de coaching, peut fragiliser l’alliance. En effet, le coaché peut se sentir « évalué » par le coach, d’autant plus dans un contexte de coaching contraint*, avec pour conséquence de placer le coach en position haute.
Les conditions de succès de l’utilisation de tels outils résident dans la déontologie et le respect de la posture de coach (position basse, ne pas donner de conseil, Art du questionnement, etc.).
Dans un prochain article, Juliette Ricou nous fera part de la façon dont elle utilise (ou pas) le MBTI en coaching.
Pour en savoir plus et vous procurer l’e-book : Apports et limites du MBTI en coaching
* Le coaching contraint est le cas où ce n’est pas le coaché qui a décidé de son coaching mais généralement son N+1 ou une personne des Ressources Humaines.
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