La rédaction web des Echos – 6 juin 2006 |
Le coaching a fait son apparition dans l’entreprise il y a presque dix ans. Avec succès, puisque les « prescriptions » pour dirigeants et managers explosent. Mais, si les directions des ressources humaines n’hésitent plus à employer cet outil de management qui a fait ses preuves, l’utiliser à bon escient est délicat, comme le montre l’exemple d’EADS (voir page suivante). Attention de ne pas ériger le coaching en solution miracle à tous les maux de l’entreprise.
Le coaching reste en quête de respectabilité
Critères de sélection plus stricts, objectifs de mission définis à l’avance : les DRH ne choisissent plus les coachs au hasard. De nouvelles exigences qui devraient pousser la profession vers le haut. LUCIE DELAPORTE
Il cherchait un moyen de sortir de l’impasse. Cofondateur d’une société, Alexis Delb, actuel PDG de Locatel Europe, une entreprise de technologies multimédia, se sent à l’étroit dans ses fonctions. La codirection d’une entreprise s’avère difficile : problèmes d’ego, crise du leadership… Le jeune dirigeant a envie de partir pour d’autres horizons mais sans savoir exactement vers quoi se diriger, ni vers qui se tourner. « Prends un coach », lui souffle alors un ami. De plus en plus de dirigeants confrontés à des situations de blocage similaires ont recours à cette formule qui s’est presque banalisée en dix ans, surtout dans les grands groupes. Le coaching est bel et bien entré dans les moeurs des entreprises. Mais qu’apporte-t-il réellement ? Avec quelques années de recul, Alexis Delb considère que ses huit mois de coaching l’ont surtout aidé à prendre sa décision : quitter l’entreprise. Mais aussi à mieux se connaître professionnellement. « Cela m’a permis d’avoir une meilleure compréhension de la manière dont je fonctionnais, ma façon, parfois étonnante, de prendre des décisions, de fuir les conflits. » Grâce à la méthode dite du cerveau gauche et du cerveau droit, il pense avoir identifié ses « zones d’effort » et ces « zones de confort », en clair, là où il se sent le plus à l’aise et les situations dans lesquelles il peine. « Je suis quelqu’un d’intuitif, j’ai donc appris à m’entourer de personnes qui ont un grand sens de l’organisation, pour compenser. » Ni thérapie, puisqu’il ne s’agit pas de remonter aux sources d’un blocage comme le fait la psychanalyse par exemple, ni conseil, puisque le coach n’a pas de solutions a priori, ni formation, car l’enjeu n’est pas le développement de connaissances techniques, le coaching de cadres dirigeants se définit comme un accompagnement personnalisé, et sur une période courte, pour améliorer la performance professionnelle… Problèmes pour faire fonctionner son équipe, difficultés comportementales dans son leadership, doute sur la stratégie à suivre… Autant de situations où le coaching est de plus en plus systématiquement prescrit. Louis Perrin, directeur marketing chez Packard Bell, s’est vu, lui, prescrire du coaching en vue d’une prochaine, mais non immédiate, évolution vers de plus grandes responsabilités. Un investissement en forme de pari sur ce haut potentiel. Pour identifier les axes d’amélioration, son coach a commencé par envoyer un questionnaire anonyme à ses supérieurs et collaborateurs pour qu’ils définissent son type de management. Il en ressort que, face à des équipes très hétérogènes, composées à la fois de designers créatifs, d’ingénieurs, son management est monolithique et essentiellement directif. Avec son coach, Pascal de Longeville (cabinet Eos), ils définissent un plan d’action pragmatique sur six mois. Conduite de réunion, gestion de l’emploi du temps des différentes équipes du service, chaque séance se veut ancrée dans la réalité quotidienne du dirigeant. « Contrairement à une formation classique au management, où l’on en reste à un niveau très théorique, le coaching s’est avéré à la fois très concret et efficace », assure Louis Perrin. Un développement sur mesure Soutien personnalisé où le coaché trouve lui-même la solution à ses interrogations… telle est la principale raison du succès du coaching aux yeux de ses promoteurs. « C’est un développement sur mesure, in situ, lié à des problèmes rencontrés sur l’instant dans l’entreprise, en cela il est irremplaçable », affirme Nicolas Schilfarth, qui a mis en place il y a quelques années, en tant que directeur des organisations et du développement, un processus de référencement des coachs chez Danone. Pour Daniel Jouve, chasseur de têtes et pionnier dans le coaching de dirigeants, « le coaching est un moment en dehors de la hiérarchie, où ces hommes qui ont d’importantes responsabilités peuvent, ce qui n’est pas toujours facile, exprimer des doutes sur leurs compétences. » Solution miracle ? A voir l’explosion récente du marché (voir ci-dessus), certains pourraient être tentés de le croire. « Il y a certainement un effet de mode, une inflation qui risque d’aboutir à la dévalorisation du coaching », prévient ainsi Vincent Lenhardt, président du cabinet Transformance. D’ailleurs, certains s’interrogent sur les risques de dérive de ce « tout coaching ». Nombre de managers ressortent dubitatifs de l’expérience, comme ce cadre d’un grand groupe de l’agroalimentaire qui avoue n’avoir pas très bien saisi l’intérêt des jeux de rôles proposés par son coach, jugés « infantilisants et vains ». Elena Fourès, coach elle-même, auteur du « Petit Traité des abus ordinaires du coaching » (1), se montre encore plus sceptique et rappelle que, dans ce marché encore immature, au mieux un mauvais coaching ne sert strictement à rien, au pire il a une influence néfaste : déstabilisation psychologique, questionnaires en 360° qui virent au jeu de massacre, manipulation, baisse des résultats. De quoi inciter à la réflexion. Nicolas Schilfarth, ancien responsable RH chez Danone, explique que le processus de sélection de coachs habilités par l’entreprise visaient à se prémunir contre les offres les plus farfelues voire « les risques d’intrusion de sectes ». Offre pléthorique Les professionnels l’admettent d’ailleurs. Le coaching souffre encore d’erreurs de jeunesse. D’où l’importance pour les entreprises de mieux s’armer face à une offre aussi pléthorique qu’hétérogène. « Depuis l’apparition du coaching il y a une dizaine d’années, on s’aperçoit que le niveau d’exigence est plus important. Les DRH font un peu plus attention à qui ils ont affaire. Plus personne ne prescrit à l’aveugle », affirme Charlotte Duda, DRH de Stream International, entreprise de services de technologie et présidente de l’ANDCP, association de DRH. En premier lieu, et alors que n’importe qui peut s’improviser coach, l’attention se porte sur la sélection de vrais professionnels. Les entreprises qui utilisent le coaching depuis longtemps, et ont des liens réguliers avec les cabinets de conseil, ont des procédures de type appels d’offres. C’est le cas d’Areva, qui a élaboré un guide du coaching pour aider les prescripteurs à choisir de vrais professionnels. Les principaux critères ? « Une expérience d’au moins dix ans en entreprise ou dans le conseil, une formation reconnue au coaching, être membres d’une association de coachs, être supervisé régulièrement par ses pairs… », indique un responsable RH, qui souligne que la liste n’est évidemment pas exhaustive et doit être complétée par les qualités de « savoir-être » du coach, comme « sa capacité à écouter, à être dans l’empathie ». Dans les entreprises de taille plus modeste, qui n’ont pas forcément les moyens ou le temps, on privilégie plutôt le bouche-à-oreille. « On travaille énormément par réseau avec des cabinets reconnus qui ont des méthodes acceptables », explique Daniel Klumb, DRH chez Socomec, groupe industriel spécialisé dans la production et la vente d’appareils électriques basse tension (1.100 salariés en France), qui se dit en particulier attentif à l’éthique du coach, à son respect des règles de confidentialité. « Un coach qui a accompagné une équipe de direction, ne peut ensuite prétendre coacher des n-2 ou n-3. » Après des années de prescription à tout-va, les entreprises commencent donc à mieux évaluer ce qu’elles peuvent, ou non, attendre du coaching. « Elles sont plus spécifiques dans leurs demandes : prise de poste, gestion de conflits, problème d’autorité. Elles ciblent mieux qu’il y a quelques années », remarque Joël Brugalières, président de la Société française de coaching. Devant les coûts du coaching – environ 10.000 euros en moyenne pour une douzaine de séances -, les prescripteurs se montrent aussi plus soucieux de mesurer le retour sur investissement. Un coaching réussi doit répondre à des objectifs précis, rappellent les professionnels. « Le but doit être précisé dès le départ, on ne fait pas du coaching au fil de l’eau. Par exemple, permettre à une personne de mener un projet à bien. La réussite dans ce cas est mesurable », affirme Xavier Lacoste, président du Syntec conseil en évolution professionnelle, organisation regroupant différents cabinets de coaching. La plupart du temps, ces objectifs seront définis lors d’entretiens tripartites entre le futur coaché, le coach et le prescripteur. Pour Marie Dubanton, coach chez Altedia, les résultats sont facilement observables. « Combien de fois dans les quinze derniers jours avez-vous pris l’initiative d’aller vers telle personne avec qui vous ne vous sentez pas en phase ? C’est du training quotidien sur des situations très concrètes. » Enfin, de plus en plus de prescripteurs, la plupart du temps les DRH mais aussi les dirigeants, n’hésitent plus à aller mettre le nez dans les cuisines du coaching. Voire de s’y former eux-mêmes. « Il est nécessaire pour eux d’acquérir un certain niveau de connaissance de ce métier encore émergent », reconnaît Vincent Lenhardt. « Beaucoup de DRH vont se former dans des écoles de coaching et savent donc de mieux en mieux de quoi on parle », renchérit Joël Brugalières. Pour Thierry Chavel, c’est bien simple, « la maturité des clients est même plus forte que celle de la profession ». Cela paraît surtout vrai pour les grands groupes, qui ont déjà derrière eux quelques années de pratique, et de déboires, dans le coaching. |
La profession cherche à offrir des repères au marché
Pour répondre aux nouvelles exigences des DRH et dirigeants en termes de coaching, la profession, encore très jeune, tente d’homogénéiser ses pratiques.
Labels, chartes déontologiques, certifications… les coachs doivent de plus en plus montrer patte blanche. Face aux inquiétudes des entreprises, qui peinent souvent à trouver des repères fiables dans ce marché émergent, les coachs s’organisent depuis quelques années pour tenter de rassurer leurs clients. Les trois ou quatre principales organisations rivalisent pour donner une image plus professionnelle du coaching.
Pionnière dans ce domaine, la société française de coaching a récemment infléchi sa politique de manière draconienne. De 700 adhérents revendiqués en 2005, elle est passée à 140 coachs « accrédités » pour « aider le public à avoir un regard clair sur ce qui se passe dans la profession ». En clair, plus question d’accepter le tout-venant à la seule condition qu’il paie sa cotisation. L’organisation a décidé de faire le ménage.
Le principe d’ouverture aux différents outils utilisés demeure : « Les coachs ne se vendent pas sur une méthode, beaucoup n’ont d’ailleurs pas qu’une seule méthode. Nous sommes pragmatiques, ce qui compte c’est le résultat. » En revanche, le coach doit s’engager à respecter le code de déontologie, où l’on retrouve l’exigence de confidentialité et le respect du coaché. Deux impératifs également : se faire régulièrement superviser et, évidemment, attester d’une formation suffisante au coaching.
Charte de déontologie
Au Syntec, organisation professionnelle représentant les cabinets de conseil, la branche coaching a fait l’objet d’une démarche spécifique. Une charte a été mise en place et les critères d’habilitation des coachs au Syntec formalisés : dix ans d’expérience, plutôt dans le management ou le conseil en gestion de carrière, avoir entrepris un travail de « questionnement sur soi-même », la plupart du temps une thérapie analytique, et connaître le fonctionnement des entreprises et des organisations. « Le Syntec valide le processus que chaque cabinet met en place. Ils devraient être une dizaine habilités avant l’été », assure Xavier Lacoste, président du Syntec.
La branche française de l’ICF, International Coach Federation – présente dans 70 pays – regroupe quant à elle près de 200 membres en France. Les critères d’adhésion, qui se résument pour l’instant à la signature de la charte de déontologie, devraient être, là encore, prochainement renforcés. « Nous aurons plusieurs catégories de membres : les membres certifiés et ceux en cours de certification », affirme Annie Martinez, présidente d’ICF France. « Le marché demande de la rigueur, même si la qualité dans nos métiers n’est pas toujours facile à évaluer. »
La fédération francophone de coachs professionnels compte pour sa part environ 200 membres. Là aussi, les adhérents doivent attester d’un minimum de 50 % d’activité dans le coaching, signer leur charte de déontologie, se faire superviser, avoir suivi une formation de neuf mois minimum dans une école référencée. On le voit, les critères de référencement sont assez similaires et tentent de coller aux attentes des clients. Reste que, malgré ces efforts, les prescripteurs semblent pour l’instant continuer à privilégier leur réseau, se méfiant encore des certifications globales.
Le coaching reste en quête de respectabilité
Après des années de prescription à tout-va, les entreprises commencent donc à mieux évaluer ce qu’elles peuvent, ou non, attendre du coaching. « Elles sont plus spécifiques dans leurs demandes : prise de poste, gestion de conflits, problème d’autorité. Elles ciblent mieux qu’il y a quelques années », remarque Joël Brugalières, président de la Société française de coaching.
Devant les coûts du coaching – environ 10.000 euros en moyenne pour une douzaine de séances -, les prescripteurs se montrent aussi plus soucieux de mesurer le retour sur investissement. Un coaching réussi doit répondre à des objectifs précis, rappellent les professionnels. « Le but doit être précisé dès le départ, on ne fait pas du coaching au fil de l’eau. Par exemple, permettre à une personne de mener un projet à bien. La réussite dans ce cas est mesurable », affirme Xavier Lacoste, président du Syntec, conseil en évolution professionnelle, organisation regroupant différents cabinets de coaching. La plupart du temps, ces objectifs seront définis lors d’entretiens tripartites entre le futur coaché, le coach et le prescripteur.
« Maturité des clients »
Pour Marie Dubanton, coach chez Altedia, les résultats sont facilement observables. « Combien de fois dans les quinze derniers jours avez-vous pris l’initiative d’aller vers telle personne avec qui vous ne vous sentez pas en phase ? C’est du training quotidien sur des situations très concrètes. »
Enfin, de plus en plus de prescripteurs, la plupart du temps les DRH mais aussi les dirigeants, n’hésitent plus à aller mettre le nez dans les cuisines du coaching. Voire de s’y former eux-mêmes. « Il est nécessaire pour eux d’acquérir un certain niveau de connaissance de ce métier encore émergent », reconnaît Vincent Lenhardt. « Beaucoup de DRH vont se former dans des écoles de coaching et savent donc de mieux en mieux de quoi on parle », renchérit Joël Brugalières. Pour Thierry Chavel, c’est bien simple, « la maturité des clients est même plus forte que celle de la profession ». Cela paraît surtout vrai pour les grands groupes, qui ont déjà derrière eux quelques années de pratique, et de déboires, dans le coaching.
EADS rationalise le recours à cet outil de management [06/06/06 ]
Gros consommateur de coaching, le groupe européen d’aéronautique a décidé il y a deux ans d’encadrer la démarche en formant les équipes RH à cet outil de management jugé prometteur.
Il fallait mettre un peu d’ordre. Si EADS est convaincu de l’intérêt du coaching, les ressources humaines du groupe d’aéronautique ont cependant décidé de rationaliser la démarche et le budget, somme toute conséquent – un millier de personnes suivent actuellement un coaching -, qui lui était consacré. Que faut-il attendre du coaching, à qui sert-il, dans quelle situation ? Comment mesurer le retour sur investissement ? Après l’avoir abondamment prescrit, les responsables des ressources humaines se sont en effet aperçus que le groupe n’a pas forcément de réponses claires à toutes ces questions.
» Ces dernières années, le coaching s’est généralisé dans l’entreprise, mais nous nous sommes rendu compte que sa perception était contrastée dans nos différents pays », explique Hervé Borensztejn, directeur du développement des ressources humaines. Pour résumer, alors qu’en Grande-Bretagne le coaching est perçu comme un privilège réservé aux hauts potentiels, en Allemagne, il est plutôt prescrit pour répondre à un problème, une déficience des managers. Dans certains pays, le coaching est même vécu comme une punition, en tout cas comme plutôt dévalorisant.
Approches contradictoires
Face à ses approches contradictoires, il devenait urgent pour le groupe européen d’unifier les pratiques mais aussi le discours en interne. EADS a donc mis en place, il y a deux ans, un groupe de travail d’une dizaine de personnes pour plancher sur ces questions. Ces professionnels des ressources humaines s’adjoignent les services du coach Thierry Chavel, associé au cabinet Alter & Coach et auteur du « Coaching démystifié » (*) qui a justement développé un programme didactique dédié aux DRH.
L’intervention de Thierry Chavel auprès du groupe a un but clair : les aider dans leur démarche de prescription. « Le coaching est souvent une réponse à une question mal posée, ce serait une sorte de sésame ». Une réponse « presse-bouton », estime celui qui enseigne le coaching à l’université d’Assas (Paris-II). Tu as des problèmes avec ton manager, va te faire coacher ! « Il y a tout un travail à faire de démystification du coaching : ce que c’est, ce que ce n’est pas. Nous ne sommes pas des pompiers. Le coaching ne doit pas devenir une réponse fourre-tout à tous les maux de l’entreprise », prévient le coach. Il se souvient par exemple du DRH d’une multinationale qui lui avait demandé d’intervenir parce qu’un patron anglais et son collaborateur allemand se déchiraient. Dans cette situation, qui doit se faire coacher ? s’était enquis le responsable des ressources humaines. Il explique patiemment que, dans ce cas précis, un travail de médiation est certainement plus adapté qu’un coaching. « Si quelqu’un devait être coaché, c’était leur patron à tous deux qui laissait faire ce genre de situation, peut-être dans la position bien connue du «diviser pour mieux régner» ».
Pour faire prendre conscience aux équipes RH des enjeux du coaching, son cabinet organise donc des rencontres interentreprises, auxquelles participe le groupe EADS. « Nous les avons fait réfléchir collectivement sur leur mode de fonctionnement. Il est important qu’ils soient en mesure de recadrer les demandes en fonction de vrais besoins. Ici, c’est du media-training, là c’est du développement personnel », soutient Thierry Chavel. « Il est aussi intéressant qu’un DRH maîtrise deux ou trois outils. Il a un rôle de préparation. Symboliquement, lorsque la personne vient me voir, 50 % du chemin est déjà parcouru. »
Document interne de référence
Hervé Borensztejn est candidat pour suivre une formation approfondie au coaching. « Non pas pour devenir coach en interne, car cela ne nous paraît pas pertinent, mais pour mieux comprendre le monde du coaching et déterminer comment nous positionner face à cette offre », explique-t-il. Il se forme pendant un an par sessions de demi-journées. Au programme : des séances entre DRH, où l’on se coache mutuellement.
Si ces formations doivent aider les entreprises à se repérer dans le coaching, pas question pour Thierry Chavel de leur fournir des méthodes clefs en main d’habilitation des coachs. « Ce sont eux qui, ensuite, ont écrit leur propres procédures. » Résultat, le groupe de travail accouche d’un document interne de référence qui établit dans quelles situations préconiser un coaching. Cette sorte de charte interne doit servir plus globalement à établir un vocabulaire commun au groupe et aider les managers à mieux comprendre les enjeux du coaching.
Auditer les coachs
Le document recense ainsi les points à évaluer pour auditer les coachs et les pièges à éviter. « Quand on ne connaît pas, on se focalise sur les outils alors que ce n’est pas le point le plus important. Si un coach vous dit : «je suis diplômé de PNL et d’analyse transactionnelle», cela ne vous dit pas s’il s’agit d’un bon coach ou non », souligne le responsable RH. « Nous lui demandons plutôt ses références, pour quel groupe il travaille. » Sur la formation, sans privilégier une école de pensée, les responsables RH s’assurent que le minimum est acquis par le candidat dans une formation didactique reconnue, mais aussi qu’il est supervisé ou qu’il participe à des groupes de travail. Idem pour le respect d’une déontologie : comment la relation contractuelle s’établit entre le coach, la fonction RH, le coaché et son supérieur hiérarchique ? « Comment ils vont travailler ensemble ? Quel type de feed-back est fait et à quel moment ? Comment sont fixés les objectifs ? Enfin, même si cela paraît évident, le coaching doit aussi avoir un début et une fin », résume Hervé Borensztejn. Des évidences qui ont mis quelques années à s’imposer, et qu’encore beaucoup de prescripteurs n’ont pas clairement formalisées.
Elena Fourès : « L’entreprise doit attendre des résultats extrêmement concrets »
COACH DU CABINET IDEM PER IDEM (1)
Dans quelles situations les entreprises ont-elles recours au coaching ?
On peut faire un coaching opérationnel quand une entreprise passe par exemple d’une organisation pyramidale à une organisation matricielle. Mais aussi lors d’une prise de poste, ou encore pour résoudre des enjeux transculturels quand un patron français d’un groupe britannique doit gérer des situations complexes entre le terrain et les attentes de sa direction.
Quels sont les excès que vous avez pu observer ?
Le coaching est prescrit dans certains groupes de façon massive. Dans ces entreprises, souvent des multinationales, tous les managers sont systématiquement coachés. Cela banalise la démarche et tend à la rapprocher de la formation classique.
Il arrive aussi qu’après un succès spectaculaire, les entreprises en viennent à vous confier tout et n’importe quoi. Il faut rappeler que le coaching n’est pas une solution miracle. Dans certains cas, il s’agit d’un problème d’organisation inhérent à l’entreprise et le coaching ne peut apporter de solution.
Concrètement que doit-on attendre du coaching ?
Il faut attendre des résultats extrêmement concrets qui répondent à des objectifs précis, définis après un audit de faisabilité entre le prescripteur, le coaché et le coach. Certaines organisations de coachs avancent qu’on ne peut pas attendre de résultats tangibles car le coaching travaille sur de l’humain. C’est en général la position de ceux qui viennent de la psychanalyse. J’estime pour ma part que lorsqu’une entreprise investit des sommes importantes – et le coaching a un coût non négligeable – elle est en droit d’attendre des résultats concrets, visibles, calibrés.
Justement, existe-il des outils pour mesurer ces effets ?
Si on prend la situation d’un coaching de prise de poste, avec une équipe qui regrette par exemple son ancien manager, il faut qu’en deux ou trois mois des progrès soient nettement mesurables. Sinon, le coaching devient de la nuisance organisée. On peut tout à fait mesurer l’ambiance d’une équipe en faisant un audit externe, ou plus simplement regarder les résultats globaux de l’entreprise. J’ai aussi en tête l’exemple d’un dirigeant très brillant, que j’ai récemment coaché, qui vivait retranché dans son bureau, coupé de l’entreprise. Après quelques séances, ses collaborateurs ont vu la différence puisqu’il venait à leur rencontre beaucoup plus souvent.
Que pensez-vous de l’apparition récente de labels ou d’organisations visant à structurer l’offre ?
Je crois que cela correspond surtout à une démarche commerciale pour rassurer le client face à tous les abus. Mais aucun n’est réellement reconnu. Certaines organisations ont fait des efforts ces derniers temps en sélectionnant un peu plus leurs membres. C’était la moindre des choses car, jusqu’ici, il suffisait de payer une cotisation pour être adhérent. Mais je ne les ai pas vraiment entendus s’insurger quand un grand groupe de téléphonie a lancé une campagne de communication dans laquelle il rebaptisait tous ses vendeurs « coachs ». Il faudrait une autorité morale pour régenter la profession, pour que n’importe qui ne puisse plus s’autoproclamer coach.
Peut-on se fier aux formations existantes ?
Là encore, sur la quarantaine d’écoles de coaching, toutes ne sont pas comparables. Si certains cursus universitaires sont intéressants, il ne faut pas laisser croire qu’on peut commencer à opérer en sortant de la faculté. Il est indispensable d’avoir une culture de l’entreprise. Quand on fait du coaching de dirigeant, il faut pouvoir se placer au même niveau que lui. Autant dire que ce n’est pas avec une licence de psychologie qu’on peut espérer faire le poids.
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